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jeudi, novembre 27, 2008

Pourrissement

Charest n'a jamais voulu diriger le PLQ. Le Québec ne convenait pas à son ambition, n'offrait qu'un horizon limité, « provincial », étriqué. Largué ici contre son gré par le Parti conservateur, son propre parti dont il était le chef, il a mis plusieurs années à s'adapter. Cette adaption maintenant faite, elle ne peut toutefois occulter une évidence fondamentale : cette homme n'a aucune vue particulière sur le Québec qu'il dirige pourtant depuis six ans.

Prenons l'exemple de Harper. On peut bien penser ce qu'on voudra du chef conservateur, on ne saurait l'accuser de ne pas avoir une idée précise du Canada qu'il souhaite créer. C'est d'ailleurs pourquoi il est tant détesté par plusieurs et tant aimé par d'autres.

Chez Charest, rien de tel. Pourquoi ? Parce que le projet souverainiste, qui a structuré la vie politique québécoise pendant 40 ans, qui était la source de sa vitalité, est à l'agonie. Son absence remarquable au cours de la présente campagne explique le vide ressenti par les citoyens. Charest a d'abord été largué à la tête du PLQ pour faire la lutte à un Lucien Bouchard perçu comme une menace par Ottawa. Lors des deux dernières campagnes, il lui a donc suffit d'attaquer comme d'habitude les visées souverainistes de Landry, puis de Boisclair. Mais voilà : le PQ de Pauline Marois a pratiquement fait le deuil de son projet fondateur. Du coup, Charest apparaît pathétiquement nu, vide d'idées, de projets pour le Québec.

Et là est le danger. Le PLQ se présente plus que jamais comme un parti d'intérêts. Son projet, c'est le pouvoir, tout le pouvoir, mis au service d'intérêts privés. Et bonjour le clientélisme, le favoritisme, les PPP dans tous les secteurs où il y a de l'argent à faire : énergie, infrastructures, santé...

Ainsi, avant de quitter la vie politique cet été, le titulaire de la Santé, Philippe Couillard, signait un arrêté ministériel favorisant son nouvel employeur en allongeant la liste des traitements médicaux qui pourront maintenant être dispensés dans les cliniques privées. (1) Mais ce n'était pas encore assez : à la demande des médecins spécialistes, cette liste peu de temps après a encore été modifiée afin d'inclure des chirurgies sous anesthésie générale, régionale et locale. (2) Le secteur des infrastructures est aussi ciblé. Le parachèvement de l'autoroute 30 en PPP coûtera vraisemblablement des centaines de millions aux contribuables selon des récentes révélations (3) (4) (5) Le troisième programme de minicentrales hydroélectriques ne permettra aucun accès du public aux documents d'appel d'offres, d'analyse des propositions, aux contrats entre les municipalités et les partenaires, empêchant ainsi l'analyse indépendante de la rentabilité des projets, des sommes versées aux municipalités, des ententes avec Hydro-Québec et les promoteurs...

Ces exemples parlent d'eux-mêmes. Lorsqu'un parti garde le pouvoir trop longtemps, il ne peut échapper au pourrissement de son éthique de la gouvernance. C'est ce qui est arrivé au Parti libéral du Canada, comme nous l'a révélé le scandale des commandites, et c'est ce qui est en train d'arriver au parti de Jean Charest, qui sera bientôt réélu pour un troisiôme mandat, du jamais vu depuis Duplessis, et qui n'a jamais eu d'autres projets que celui d'une « réingénérie » conçue comme une dilapidation du bien public.

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(1) Lacoursière, Ariane. « La CSN et la FTQ tentent de stopper le développement du privé en santé ». Cyberpresse [En ligne] (Jeudi 27 novembre 2008) (Page consultée le 27 novembre 2008)

(2) Beauchemin, Malorie. « Couillard a ouvert la porte au privé avant de quitter ». Cyberpresse [En ligne] (Mecredi 20 août 2008) (Page consultée le 27 novembre 2008)

(3) Francoeur, Louis Gilles. « Prolongement de l'A-30 en PPP - Québec a versé 27 millions à des consultants ». Le Devoir [En ligne]. (Mercredi 19 novembre 2008) (Page consultée le 27 novembre 2008)

(4) Francoeur, Louis Gilles. « Autoroute 30 - Les ingénieurs du gouvernement contestent les chiffres de l'Agence des PPP ». Le Devoir [En ligne]. (Vendredi 7 novembre 2008) (Page consultée le 27 novembre 2008)

(5) Francoeur, Louis Gilles. « A-30 en PPP : les contribuables épargneraient 751 millions ». Le Devoir [En ligne]. (Jeudi 6 novembre 2008) (Page consultée le 27 novembre 2008)

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